Le temps de la révision de l’accord d’association avec l’UE, signé en 2002 et entré en vigueur en 2005, est visiblement arrivé.
Karim Aimeur – Alger (Le Soir) – Une délégation de la direction générale du commerce de la Commission européenne (CE) sera à Alger pour une visite de deux jours avant la mi-novembre. Sa mission: discuter avec les autorités sur la révision de l’accord d’association entre l’Algérie et l’Union européenne, signé en 2002 et entré en vigueur en 2005. L’annonce est faite par le nouvel ambassadeur de l’Union européenne en Algérie, Diego Mellado Pascua, dans un entretien accordé à l’agence de presse espagnole EFE. Le diplomate européen a précisé qu’il ne s’agit pas d’une procédure d’arbitrage. Les consultations seront d’ordre technique et porteront sur les différends commerciaux entre les deux parties.
Depuis plusieurs années, Alger exprime son souhait de procéder à la révision de cet accord signé dans des conditions défavorables, ce qui a donné un avantage aux pays européens au détriment de l’Algérie. L’écart des échanges commerciaux entre les deux parties (sans inclure les hydrocarbures) est énorme.
Le ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, a affirmé, récemment, que l’évaluation faite en 2015 sur dix ans (2005-2015) a montré un déséquilibre, avec des exportations hors hydrocarbures atteignant 14 milliards de dollars, tandis que les importations depuis l’UE ont atteint 220 milliards de dollars.
Diego Mellado Pascua n’ignore pas l’ampleur du déséquilibre.
Il a soutenu que «les clauses de l’accord n’ont pas permis à l’Algérie de diversifier ses échanges, bien qu’il lui ait été très favorable, si l’on inclut les hydrocarbures dans la balance commerciale».
Au terme de la cérémonie de remise de ses lettres de créance au président de la République, Abdelmadjid Tebboune, le nouvel ambassadeur de la Mission de l’Union européenne (UE) avait exprimé le souhait de «continuer à travailler ensemble et nous assurer que les économies algérienne et européenne soient intégrées et que le dialogue politique puisse continuer».
Les conditions ont changé
Il a qualifié l’Algérie de «partenaire privilégié, essentiel et fondamental de l’Europe».
Sauf que l’accord d’association est très désavantageux pour l’Algérie qui, à un certain moment de son histoire, s’est livrée les mains liées aux instruments financiers de la mondialisation qui ont aggravé sa vulnérabilité. Aujourd’hui, les conditions ont changé et Alger veut bien que ce changement soit pris en compte dans le processus de révision de l’accord d’association.
L’ambition initiale de l’Algérie dans cet accord était de préparer le terrain pour l’accès de ses produits manufacturiers sur les marchés européens ainsi que l’attractivité pour les investissements directs étrangers (IDE) d’origine européenne.
«Après une dizaine d’années de mise en œuvre des principales clauses de l’accord, un bilan partiel a été fait dans lequel un déséquilibre grave en ressort au détriment de l’économie nationale. Sur le plan commercial, le déficit flagrant de la balance commerciale entre les deux parties, un manque à gagner sur le plan fiscal pour le pays suite au démantèlement tarifaire progressif et enfin les investisseurs européens qui se sont détournés de la destination Algérie.
Parallèlement, l’Union européenne a renforcé son arsenal de protection de ses marchés pour les produits industriels ainsi que les produits agricoles et de pêche. D’où le dilemme actuel pour l’Algérie qui se retrouve avec un démantèlement tarifaire pour les produits d’origine européenne, sans que les produits algériens puissent accéder aux marchés européens trop bien protégés», constate l’économiste Brahim Guendouzi.
La réduction de l’écart est un objectif primordial pour l’Algérie.
Le Président Tebboune a estimé «nécessaire» la révision annoncée pour 2025. Elle sera menée «avec souplesse et dans un esprit amical sans entrer en conflit», avait indiqué M. Tebboune, affirmant que «l’accord avec l’Union européenne a été conclu à une époque où l’Algérie était bien différente de celle d’aujourd’hui».
«A l’époque, la contribution de l’industrie au revenu national ne dépassait guère 3% et nous importions des produits agricoles sans en exporter. En d’autres termes, l’Algérie d’alors n’avait pas de capacités d’exportation (…). La donne a changé, l’Algérie produisant et exportant désormais une grande variété de produits manufacturés, électroménagers et autres. Aujourd’hui, nous demandons une révision, car l’essence même de l’accord avec l’Union européenne repose sur le libre-échange, et nous souhaitons le faire dans un esprit amical sans entrer en conflit», avait argué le chef de l’Etat.
K. A.
Source : https://www.lesoirdalgerie.com/